Journée internationale de la langue et de la culture créole : L’introduction du créole au Parlement fait débat
28 OCTOBRE 2020
PAR ADILA MOHIT-SAROAR
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Depuis 1983, le 28 octobre a été décrété Journée internationale de la langue et de la culture. Si Maurice avait accumulé du retard concernant la valorisation de notre langue maternelle, au fil des années, on a pu réduire cet écart. Entre la concrétisation du dictionnaire, l’introduction du créole dans les écoles, il n’y a que son introduction au Parlement qui est en suspens. Un groupe d’universitaires travaille sur un projet en ce sens.
Le professeur Arnaud Carpooran, qui est le Personal Chair in French and Creole Studies, doyen de la faculté des Social Sciences and Humanities, mais aussi président de la Creole Speaking Union, affirme que cela fait de nombreuses années que la Journée internationale de la langue créole et de la culture créole est célébrée. Ajoutant que Maurice était en retard en la matière, mais fait désormais relativement bien. « C’est l’Université de Maurice qui a commencé à célébrer cette Journée. Cette année, ce sera la 20e édition. On doit avouer que, depuis la première édition, il y a eu une réflexion et les choses ont beaucoup avancé », explique le Pr Carpooran.
Il cite plusieurs événements majeurs, notamment le dictionnaire en créole, dont le prototype est sorti en 2005, la première édition en 2009, la deuxième en 2011 et la dernière en 2019. Le Pr Arnaud Carpooran souligne, de plus, la célébration du festival kreol, devenu un rendez-vous annuel depuis 2006. En sus, la langue créole a été introduite dans le cursus scolaire, soit dans le primaire en 2012, et dans les collèges en 2018, alors qu’à l’université il y a un programme depuis six ans.
« On a fait un bon bout de chemin, tant au niveau académique, scientifique et scolaire. Il faut que le créole soit désormais introduit dans d’autres institutions, dont le Parlement. Je trouve que c’est bon signe que les ministères respectent l’orthographe dans les publicités. On entame des discussions plus poussées afin que le créole soit proposé comme sujet en SC et HSC », déclare le président de la Creole Speaking Union.
Terminologie discutée
Sur le volet concernant l’introduction du créole au Parlement, en juillet de cette année, le chef du gouvernement affirmait dans l’hémicycle que ce processus prendra du temps. « La maîtrise de la langue à tous les niveaux est un prérequis majeur de son introduction à l’Assemblée nationale. Et, ce processus prendra du temps.
Pour que le kreol soit utilisé au Parlement, nous devons nous assurer que les parlementaires et le personnel de l’Assemblée aient reçu une formation appropriée pour cette langue ». C’est ce qu’a fait comprendre Pravind Jugnauth, en réponse à une question ayant trait à l’utilisation du kreol au Parlement. C’était lors de la Prime Minister’s Question Time (PMQT), à l’Assemblée nationale, le 7 juillet dernier.
Entre-temps, un groupe d’universitaires a travaillé sur un projet s’intitulant « Preparasion terin pou introdiksion Kreol Repiblik Moris dan Parlman ». Parmi, la chargée de cours, Christina Chan-Meetoo, qui est également membre du board de la Creole Speaking Union. Elle précise qu’il y a plusieurs sous-comités qui ont travaillé sur différents aspects, notamment la terminologie, le registre de langue (par exemple : Unparliamentary language), l’informatique, l’information et la formation. « Il y a tout un travail à faire à partir des méthodologies. On a commencé le travail qui se structure au fur et à mesure », soutient-elle.
Christina Chan-Meetoo dit, par ailleurs, espérer que tous ceux qui veulent écrire continuent de faire l’effort de bien respecter l’orthographe standard, comme ils le feraient pour toute autre langue. « Le créole poursuit son chemin vers une utilisation reconnue de sa forme écrite standard dans les structures formelles. Il y a déjà de plus en plus de situations où le créole est utilisé pour communiquer avec le public en général, que ce soit dans les instances publiques ou commerciales privées », indique Christina Chan-Meetoo. Elle ajoute qu’il y a encore des progrès à faire pour assurer le respect de l’orthographe officielle, mais il est indéniable qu’il y a souvent de la bonne volonté et des efforts.